Louer son terrain pour accueillir une éolienne peut rapporter entre 3 000 et 15 000 € par an à un agriculteur, selon la puissance installée et les conditions négociées. Ce revenu complémentaire s’inscrit dans un contrat de longue durée, généralement 20 à 30 ans, et dépend de plusieurs facteurs qu’il convient de bien comprendre avant de s’engager.
Les revenus annuels : de 3 000 à 15 000 € par éolienne
Le montant perçu par un agriculteur dépend avant tout de la puissance de l’éolienne, exprimée en mégawatts (MW). En France, une éolienne terrestre standard affiche une puissance comprise entre 2 et 5 MW.
La rémunération se calcule généralement entre 1 000 et 5 000 € par MW et par an. Pour une éolienne de 3 MW, cela représente un loyer annuel compris entre 3 000 et 15 000 €, avec une moyenne observée autour de 10 000 € par an.
Prenons un exemple concret. Dans le Nord, près de Caudry, des agriculteurs perçoivent environ 3 000 € par MW installé, soit près de 10 800 € par an pour une éolienne de 3,6 MW. Après partage avec le propriétaire foncier, l’exploitant agricole touche environ 5 000 € par an et par éolienne.
Comment se calcule la rémunération ?
Deux systèmes de calcul coexistent. Le premier repose sur un loyer par mégawatt installé, indexé sur la puissance de l’installation. Le second propose un loyer fixe par éolienne, indépendant de sa production réelle.
Le loyer au mégawatt reste le plus répandu. Il offre une visibilité claire et proportionnelle à la taille du projet. Le loyer fixe, plus rare, sécurise le revenu mais peut s’avérer moins avantageux si l’éolienne affiche une puissance élevée.
Partage entre propriétaire et exploitant
Lorsque le propriétaire du terrain et l’exploitant agricole sont deux personnes distinctes, le loyer se partage entre eux. La répartition la plus courante s’établit à 50/50, mais elle se négocie librement.
Si le propriétaire exploite lui-même ses terres, il perçoit l’intégralité du loyer. Dans tous les cas, cette répartition doit figurer clairement dans le contrat tripartite signé au démarrage du projet.
Les autres indemnités à négocier
Au-delà du loyer principal, plusieurs indemnités complémentaires peuvent être négociées pour compenser les contraintes d’exploitation liées à la présence de l’éolienne.
Indemnités complémentaires pendant l’exploitation
Le poste de livraison occupe environ 300 m² et justifie une indemnité minimale de 1 000 € par an. Cette installation, nécessaire au raccordement électrique, reste en place durant toute la durée du contrat.
Le passage des câbles souterrains fait l’objet d’une compensation unique, généralement fixée à 3 € par mètre linéaire. Ces câbles relient les éoliennes au poste de livraison.
Le surplomb des pales au-dessus d’une parcelle voisine donne lieu à une indemnité annuelle d’environ 300 €, même si le mât est implanté sur une autre parcelle.
Les chemins d’accès créés ou élargis pour permettre la maintenance peuvent être indemnisés autour de 1 € par m² et par an, selon leur emprise.
Enfin, une indemnité pour impossibilité de construire peut être prévue, généralement autour de 100 € par an, pour compenser les servitudes imposées.
Indemnités pendant les travaux
La phase de construction occasionne des dégâts temporaires aux cultures. La Chambre d’agriculture de la Somme a établi un barème indicatif : 0,27 € par m² pour le blé, 0,29 € pour le maïs, 0,50 € pour les betteraves et 0,73 € pour les pommes de terre.
Pendant la période d’études de faisabilité, le propriétaire peut demander une indemnité d’immobilisation d’environ 800 €, en contrepartie de la clause d’exclusivité accordée au développeur éolien.
Le cadre contractuel : ce qu’il faut savoir
L’installation d’une éolienne engage l’agriculteur sur le long terme. Le cadre juridique mérite une attention particulière.
Bail emphytéotique et durée
Le contrat prend la forme d’un bail emphytéotique, d’une durée généralement comprise entre 20 et 30 ans, renouvelable. Cette durée correspond à la vie technique de l’éolienne et à la période d’amortissement de l’investissement.
Sur 25 ans, avec un loyer annuel de 10 000 €, cela représente un revenu total de 250 000 €. Ce montant doit être mis en perspective avec les contraintes acceptées sur la même période.
Contrat tripartite
Le contrat lie trois parties : le propriétaire foncier, l’exploitant agricole (s’il est différent) et l’opérateur éolien. Chacun y trouve ses droits et obligations.
Un protocole d’accord signé en juin 2006 entre la FNSEA, l’APCA (Association Permanente des Chambres d’Agriculture) et le Syndicat des Énergies Renouvelables définit un cadre sécurisé pour ces conventions. Il fixe les bases d’une négociation équilibrée.
Points de vigilance avant de signer
La clause d’exclusivité pendant la phase d’étude mérite d’être compensée financièrement. Elle empêche le propriétaire de négocier avec un autre développeur pendant plusieurs années.
La remise en état du site après exploitation doit être garantie contractuellement. L’opérateur s’engage à démonter l’éolienne et à retirer les fondations jusqu’à au moins 1,20 m de profondeur. Mieux vaut exiger une remise en état totale.
Les garanties financières pour le démantèlement doivent figurer explicitement dans le contrat. Elles assurent que les fonds nécessaires seront disponibles, même en cas de défaillance de l’exploitant.
Se faire accompagner par la Chambre d’agriculture ou un juriste spécialisé reste vivement recommandé. Les aspects juridiques et fiscaux du contrat nécessitent une expertise technique.
Ce qui influence les montants perçus
Plusieurs facteurs déterminent le niveau de rémunération qu’un agriculteur peut espérer obtenir.
La puissance de l’éolienne reste le critère principal. Les modèles récents affichent entre 2 et 5 MW. Plus la puissance est élevée, plus le loyer augmente, puisqu’il se calcule généralement au mégawatt.
L’emplacement géographique joue un rôle majeur. Les zones venteuses du nord et de l’est de la France, où le potentiel éolien est plus élevé, permettent de négocier des loyers plus attractifs. La production attendue influence directement la rentabilité du projet.
Le nombre d’éoliennes sur une même exploitation multiplie mécaniquement les revenus. Un parc de 5 éoliennes peut ainsi générer entre 25 000 et 75 000 € par an pour l’ensemble du site.
La qualité de la négociation fait la différence. Un agriculteur bien informé et accompagné obtiendra des conditions plus favorables qu’un propriétaire isolé face à un développeur expérimenté.
Fiscalité et retombées pour le territoire
L’installation d’éoliennes génère des flux financiers qui dépassent le seul loyer versé à l’agriculteur.
Traitement fiscal pour l’agriculteur
Pour le propriétaire foncier, le loyer perçu est qualifié de revenu foncier et s’ajoute aux autres revenus de cette catégorie. Il entre dans le barème progressif de l’impôt sur le revenu.
Pour l’exploitant agricole, la part qui lui revient constitue un produit d’exploitation. Elle s’inscrit dans le compte de résultat de l’exploitation et relève du régime agricole.
Cette différence de traitement fiscal doit être prise en compte lors de la négociation du partage entre propriétaire et exploitant.
Retombées fiscales locales
Les collectivités territoriales bénéficient de l’Imposition Forfaitaire sur les Entreprises de Réseaux (IFER). Son montant s’élève, au 1er janvier 2024, à 8 360 € par mégawatt installé.
Cette taxe se répartit entre le département (30 %), les communes (40 %) et l’intercommunalité (30 %). Pour un parc de 14 éoliennes de 3,6 MW chacune, cela représente environ 600 000 € par an pour le territoire.
Ces ressources financent des infrastructures, des services publics ou des projets de développement local. L’éolien génère ainsi des retombées bien au-delà du seul bénéfice privé de l’agriculteur.
Avantages et contraintes pratiques
L’installation d’une éolienne modifie le quotidien de l’exploitation, avec des aspects positifs et des inconvénients à anticiper.
L’emprise au sol reste limitée. Une éolienne occupe entre 2 000 et 3 000 m², fondations et plateforme comprises. Les chemins d’accès ajoutent quelques centaines de mètres carrés supplémentaires.
La poursuite de l’activité agricole reste possible autour de l’installation. Les cultures peuvent se développer jusqu’au pied du mât. Seule la zone technique demeure inaccessible.
L’accès au site doit être garanti pour la maintenance et les interventions techniques. L’opérateur dispose d’un droit de passage permanent, ce qui peut occasionner des contraintes lors des périodes de travaux agricoles.
Les nuisances sonores se limitent généralement à un léger bruit de fond les jours de vent. À 600 mètres, comme dans l’exemple du Nord, l’impact reste faible. Certains agriculteurs le comparent au bruit de la mer.
L’impact visuel divise. Si certains exploitants s’accommodent bien de la présence des éoliennes, d’autres regrettent la transformation du paysage. Cette dimension subjective mérite d’être pesée avant de s’engager.
Une source de revenus à bien évaluer
L’installation d’une éolienne représente un complément de revenu significatif pour un agriculteur, avec des montants compris entre 3 000 et 15 000 € par an selon les projets. Ce revenu stable sur 20 à 30 ans offre une diversification intéressante dans un contexte de volatilité des prix agricoles.
L’engagement reste toutefois conséquent. La durée du contrat, les servitudes imposées et les enjeux de remise en état nécessitent une analyse approfondie. Se faire accompagner par des professionnels du droit et de l’agriculture permet de négocier dans les meilleures conditions et d’éviter les pièges contractuels.

